«Réviser toute la Constitution, vraiment?»

La N-VA et son chef de file Bart De Wever veulent déposer une proposition de révision incluant tous les articles de la Constitution. Une démarche qui crée un peu plus la confusion dans l’esprit du citoyen.

par Stéphanie WATTIER

 

Comme chacun le sait, le 26 mai prochain auront lieu les élections au niveau européen ainsi qu’aux niveaux fédéral et régional en ce qui concerne le citoyen belge.

En Belgique, la législature au niveau fédéral prend ordinairement fin cinq ans après les élections (article 105 du Code électoral). Cette hypothèse de fin ordinaire n’a cependant plus eu lieu depuis 1929 et ce sont les hypothèses de fin anticipées qui sont, depuis lors, privilégiées. Parmi ces hypothèses, celle qui prévaut depuis les années 1980 est celle du dépôt d’une déclaration de révision de la Constitution, laquelle entraîne la dissolution de la Chambre et du Sénat et, dès lors, la tenue d’élections afin de pourvoir à leur renouvellement.

Cette année, cette hypothèse semblait toutefois écartée, à tout le moins jusqu’il y a peu, à en croire les différentes interventions dans la presse de plusieurs parlementaires dont Siegfried Bracke, président de la Chambre.  

Charles Michel ayant démissionné fin de l’année 2018, il était attendu que la Chambre vote sa propre dissolution en application de l’article 46, alinéa 3, de la Constitution et les élections auraient lieu, comme prévu, dans un délai de 40 jours que l’on aurait fait coïncider avec le 26 mai.

C’était, semble-t-il, sans compter sur le dernier soubresaut de cette législature, à savoir l’intention de Bart De Wever, président de la N-VA, de déposer une proposition de déclaration de révision de la Constitution dans laquelle serait repris l’ensemble des articles de la Constitution.

Constitutionnellement, le dépôt d’une telle proposition ne soulève pas d’obstacle dans la mesure où le droit belge ne connaît, contrairement à certains de ses voisins européens, pas de limites matérielles à la révision de la Constitution. Autrement dit, tous les articles de la Constitution sont révisables en Belgique.

La N-VA ayant quitté le Gouvernement fédéral, il y a lieu de s’interroger sur la majorité politique qui pourrait bien, au sein de la Chambre des représentants et au sein du Sénat, appuyer une telle proposition car l’on rappellera qu’une proposition de déclaration de révision de la Constitution doit, pour être valablement adoptée, recueillir la majorité absolue des voix dans les deux chambres, cette matière continuant à relever du bicaméralisme intégral.

Politiquement, une telle proposition de déclaration de révision paraît donc plus questionnable, outre le caractère provoquant qu’elle sous-tend et la confusion qu’elle peut créer dans l’esprit du citoyen. En effet, la notion de « déclaration de révision de la Constitution » – qui n’engage aucunement à ce qu’une révision ait ensuite effectivement lieu lors de la législature suivante – semble parfois volontairement confondue avec celle de « révision (effective) de la Constitution » qui nécessitera, quant à elle, une majorité qualifiée de deux tiers à la Chambre et au Sénat pour être adoptée.

Cette confusion paraît d’autant plus regrettable dans un climat où le citoyen semble perdre confiance dans les institutions politiques et dans le modèle démocratique en place, alors que l’énergie préélectorale devrait être prioritairement placée dans de réels enjeux sociétaux à l’instar des questions climatiques, de l’immigration, de l’emploi, etc.

 

https://plus.lesoir.be/212014/article/2019-03-13/reviser-toute-la-constitution-vraiment